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Interview

Mathieu Kassovitz «La Haine ne nous appartient plus» .

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CINEMA. Montrer son film à tout le monde mais sans se faire récupérer; ne pas se faire du beurre sur le dos de la banlieue qu'il ne veut pas trahir: telles sont les exigences de Mathieu Kassovitz.
publié le 31 mai 1995 à 4h37

Avant de présenter la Haine à Cannes et d'y décrocher le prix de la mise en scène, Mathieu Kassovitz tentait de déminer les pièges qui pouvaient guetter son film, de sortie sur les écrans aujourd'hui. Sera-t-il rattrapé, happé par un effet mode? En tous cas, le jeune metteur en scène qu'il est se défend d'exploiter un dossier chaud.

Le ton de «la Haine» est d'abord celui de la distance par rapport à la charge du sujet. Vous dégoupillez souvent une situation tendue par une vanne ou un effet comique.

Parce que c'est ce qui se passe dans la vie, les gens qui m'intéressent fonctionnent en désamorçant. Et ce sont eux que j'ai envie de mettre dans les films. Ken Loach aussi parle des gens du peuple, mais comme il les aime, il les décrit normalement, c'est-à-dire comme des gens intelligents, qui sont dans la merde. Si vous prenez deux secondes pour discuter avec des SDF dans la rue, vous verrez qu'ils rigolent. Bien sûr il y en a qui pleurent parce que ce qu'ils vivent est tellement dur. Mais il y en a d'autres qui ont réussi à prendre du recul. Du coup ce sont des gens avec qui on peut avoir une communication intéressante.

Vous n'êtes pas complaisant avec vos personnages, quand ils sont ridicules vous le montrez.

On ne peut pas être dans le vrai, si on ne prend pas un minimum de recul. Il ne faut pas seulement dire que ce sont des mecs magnifiques et qui ont tous des rêves. Non, il y a aussi des sales connards et chez les flics il y a des mecs très in