Ni caprice ni snobisme: Catherine Deneuve a tourné avec un réalisateur réputé difficile par plaisir et par «envie de rester vivante par rapport à ce [qu’elle] aime».
Comment est né votre désir de tourner dans un film de Manoel de Oliveira?
On avait déjà eu un projet ensemble, il y a plus de quinze ans. Et puis j’ai rencontré une journaliste portugaise pour un entretien et je lui ai confié que j’aimerais bien travailler un jour avec Oliveira. C'était presque une boutade. Mais cette journaliste était une amie d’Oliveira, elle lui a transmis mon souhait. Ensuite le producteur Paolo Branco m’a appelé. Il m’a dit: «Je sais que...» J'étais au Portugal pour quelques heures, Paolo a organisé une rencontre à l’hôtel et ça c’est passé très naturellement avec Oliveira: c’est un homme tellement simple, mais aussi tellement charmeur, malicieux, juvénile. On sent tout de suite que sa vie, ou plus exactement toutes ses vies, correspond parfaitement à ce qu’il dit. C’est quelqu’un qui se préserve, pas tellement à cause de son âge mais comme un sportif qui se prépare à l’effort. Ensuite il a fait écrire le livre à Agusti na Bessa-Luis, puis le scénario. Mais quand il est venu me voir à Paris, il n’avait qu’un petit sac en plastique avec à l’intérieur un synopsis très court et des photos de repérages des endroits où il voulait tourner: la forêt, le couvent, la chapelle.
Lorsque j’ai finalement eu le scénario, ça m’a un peu déroutée. Autant les images m’avaient fait rêver, autant les mots mis sur ces images me semblaient en retrait, d’une étrangeté trop brève. Heureus