Les Italiens pleurent mezza voce. Pleurent les habitants de Trastevere, le quartier où il habitait, les garçons del Comparone, son restaurant préféré. Le «peuple» de Rome attend l'ouverture de la chapelle ardente, demain au Capitole, pour saluer l'homme quelconque, l'antihéros «qui s'en est allé sur la pointe des pieds». L'Italie officielle, elle, semble vouloir se surpasser en rhétorique. Le maire de Rome a fait draper de noir la fontaine de Trevi, où fut tournée la scène célèbre de la Dolce Vita, et devant laquelle une foule impressionnante s'est recueillie hier. Le comité olympique national a interrompu sa réunion et observé une minute de silence: le comble de l'ironie pour quelqu'un comme Marcello, fier de sa paresse et fou d'Oblomov. Ministres et autorités de l'Etat y sont allés de leurs commémorations de circonstance. Les chaînes de télévision ont été manifestement prises au dépourvu. Si tous les journaux télévisés lui ont consacré leur ouverture et de longs services, seule l'une des trois chaînes publiques a changé en catastrophe ses programmes du matin. La RAI a sorti du tiroir une émission spéciale déjà diffusée en octobre et même une interview vieille de deux ans, donnée par l'acteur à l'occasion de son soixante-dixième anniversaire. Quelques films somme toute mineurs, la Femme du dimanche et Divorce à l'italienne, seront rediffusés: les titres les plus prestigieux du catalogue sont, paraît-il, aux mains des majors américaines. On revoit avec délectation les images
Reportage
Les larmes de l'Italie sur son antihéros
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par Edouard MIR
publié le 20 décembre 1996 à 2h47