Le documentariste entre en scène. Il se filme, filme son père ou sa grand-mère, fait de sa trajectoire généalogique un matériau filmable. Voilà l'un des aspects remarquables de ce XIXe festival international de films ethnographiques et sociologiques, dit Cinéma du réel. Le documentaire, genre particulièrement attendu au tournant de l'objectivité, plonge soudainement dans le genre personnel, voire le film de famille. Emblématique est en cela le film de Jonas Mekas (datant pourtant de 1972), présenté en ouverture des films baltes. Voyage en Lituanie retrace le retour des deux fils Mekas, exilés à New York, dans leur village d'origine où ils retrouvent leur mère, que leur caméra cerne avec la peur de la perte. Ce film rassemble quelques éléments que l'on retrouvera dans les films frères d'aujourd'hui. Une quinzaine de films parmi la centaine sélectionnés cette année par la directrice du Réel, Suzette Glénadel. Il s'agit pour ces jeunes cinéastes de refaire, caméra à la main, le chemin de l'exil à l'envers. D'aller rechercher ses racines, bien sûr, mais aussi de donner à cette expérience particulière une dimension universelle. Un cinéma de «personnes déplacées» comme le dit Mekas. A prendre dans tous les sens. «C'est une tendance, explique Esther Hoffenberg, productrice qui fut, ces deux dernières années, membre de la Commission d'aide à l'écriture de documentaires. Un phénomène évidemment lié à l'émigration. "Mon père, cet émigré, ou "Mon grand père, ce déporté... Des émigrés q
Le réel se cherche un passé
Article réservé aux abonnés
publié le 14 mars 1997 à 22h24
Dans la même rubrique