Olivier Assayas, jeune réalisateur français (derniers films: Irma Vep et HHH, un portrait du réalisateur taïwanais Hou Hsiao Hsien), parle de sa passion pour Titanic. Non pas pour déposer une gerbe de plus aux pieds du succès, mais pour expliquer que Titanic est un rêve qui hante le cinéma.
«Titanic me semble l'accomplissement d'un rêve qui traverse le cinéma moderne: c'est-à-dire un film qui veut à la fois être plus grand que le cinéma, à la façon de Welles, et en même temps être en osmose avec le grand public. Beaucoup de cinéastes s'y sont essayés: Bertolucci avec Novecento, Sergio Leone avec Il était une fois l'Amérique ou Michael Cimino avec Heaven's Gate. Autant de films qui, comme par hasard, enquêtent sur la circulation mythologique entre la vieille Europe et le Nouveau Monde, mais qui s'y sont, avec panache, cassé les dents. Je veux dire que, s'ils n'ont pas retrouvé, comme Cameron, le moule perdu, c'est peut-être parce qu'ils n'étaient pas assez américains. Il fallait être foncièrement américain pour, à la fois, investir la machine hollywoodienne, lui faire cracher tous ses trésors en dollars et en moyens techniques, et, en même temps, faire exploser la machine. Il fallait, pour tout dire, être innocent.
Entre autres génies du film, il y a par exemple celui du casting, ces deux acteurs beaux et purs qui, physiquement, captent quelque chose de l'avant guerre de 1914, c'est-à-dire quelque chose du cinéma muet et de l'espoir qu'il incarnait, à la jointure d'un monde qui