Un bébé troqué contre une lettre, un jeu de chaises musicales à trois personnages en quête de leur juste place. Au fil des ans, Marco Bellocchio a échangé la ferveur inventive de ses débuts (les Poings dans les poches, ou plus tard Henri IV, le Diable au corps) contre un classicisme légèrement rangé des voitures, comme ce Prince de Hambourg, adapté de Kleist et présenté à Cannes il y a trois ans. Evolution qui correspond à l'adoucissement de son regard sur son thème de prédilection, la folie, dont il semble réfuter désormais la dimension exacerbée et spectaculaire au profit de sa tonalité plus ordinaire, planquée sous l'apparente normalité. Avec cette Nourrice en demi-teintes, il rôde sans cri ni fureur autour des affres et délices de la maternité. En costumes. Au début du siècle, à Rome socialement troublée, la femme d'un psychiatre ne réussit pas à allaiter son bébé. Une paysanne en difficulté est recrutée comme nourrice. Vittoria (Valéria Bruni-Tedeschi) se retrouve progressivement dépossédée sur ses propres terres de son statut de mère, donc d'épouse. L'instinct maternel lui faisant défaut, son inutilité à ses propres yeux est attestée, son mari impuissant à l'aider (sa bienveillante intelligence ne lui sert ni dans son asile de folles ni chez lui). Le destin littéraire du film (adapté de Pirandello) se pointe sous la forme d'une lettre interceptée et lue par Vittoria avant d'être remise à Annetta, la nourrice et sa véritable destinataire. Le contenu de cette lettre écri
Critique
Avec cette «Nourrice», on reste sur sa faim
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par Isabelle POTEL
publié le 20 mai 1999 à 1h07
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