Ne tortillons pas: on est très contents pour Rosetta, pour les frères Jean-Pierre et Luc Dardenne, et pour leur palme d'or, attribuée, comme ce fut souvent le cas ces dernières années, à un film montré in extremis, dans les dernières journées de la compétition (le Goût de la cerise d'Abbas Kiarostami en 1997, l'Eternité et un jour de Theo Angelopoulos l'an passé).
Finalement, ce palmarès ressemble beaucoup au festival qu'il a conclu: un démarrage sous de bons augures, des noms excellents et qu'on n'espérait pas voir récompensés (Manoel de Oliveira, Sokourov), un creux au milieu (trop d'Humanité, pas assez d'Almodovar), et finalement une conclusion au sommet en forme de choc heureux avec la révélation Rosetta.
Cohérence et radicalité. La surprise est d'autant plus agréable qu'après l'apparition, il y a trois ans, de la Promesse à la Quinzaine des réalisateurs, on pouvait craindre que le miracle Dardenne ne se reproduise pas. Chose rare, la récompense cannoise (attribuée à l'unanimité du jury) tombe pour une fois à pic, qui ne consacre pas un auteur surétabli ni n'engage de pari aventureux, mais joue son rôle de tête chercheuse. Sur ce point, le président Cronenberg nous aura beaucoup plus convaincus que Scorsese l'an dernier: il fait la démonstration d'un oeil curieux, grand ouvert et qui ne craint pas d'encourager des artistes éloignés de sa manière même d'envisager le cinéma. Cette ligne n'est peut-être pas très glamour ni nuancée; elle est cohérente, radical