Le héros-titre du Petit Criminel de Jacques Doillon, c'était lui, et c'était il y a déjà dix ans: un premier rôle en tête d'affiche pour un film qui ne le lâchait pas d'une semelle et dont il habitait presque chaque plan. Il obtint pour cette impressionnante naissance au cinéma un césar justifié de «meilleur espoir masculin», et il s'ensuivit un grand vide assourdissant, le grand vide banal des lendemains de trop belles fêtes. Depuis, Gérald Thomassin n'a pas complètement disparu des circuits: on l'a vu sur grand écran (la Petite Lola, Louise Take 2) et parfois sur le petit (pour Josée Dayan ou Gérard Vergès), mais personne ne lui avait fait le cadeau d'un nouveau grand rôle jusqu'à Jean-Patrick Lebel pour Calino Maneige, par ailleurs premier long métrage de fiction de ce documentariste.
Ce Calino Maneige n'est sans doute pas le chef-d'oeuvre du siècle, mais la pierre modeste apporté par un cinéaste dont la conscience sociale et politique semble avoir guidé chaque pas. Du point de vue de la délicatesse et de l'empathie, c'est un sans-faute: histoire d'un très jeune couple de banlieue, dans la dèche mais combatif et en lutte contre toutes les précarités, Calino Maneige est un constat sans fard sur l'âpreté des temps. En quête d'un lyrisme poétique et moderne qui reste à réinventer, Lebel creuse sur cette toile sociale hyperréaliste l'inattendu filon Méliès du cinéma, avec incrustations, fondus graphiques, échappées formelles. Le résultat est chaotique mais parfois étonnant. Né