C'est un plaisir de retrouver l'acteur Jean-Pierre Bacri à la télévision, un univers secondaire qu'il aime visiblement peu, mais où il sait très bien s'imposer. Bacri a appris à manipuler le personnage que sa marionnette, sur Canal +, a popularisé: celui du mal embouché. Mais, ici, la marionnette est moins bonne que le modèle. Indice de sa complexité: on ne peut pas réduire, même en latex, l'acteur-auteur à sa mauvaise humeur. Il est plus joueur, plus fin que ça. Avec son archétype, il pratique la distanciation bacrienne: il l'installe au naturel et puis l'utilise, la déforme, lui impose des variations. Malin, il donne ce qu'on attend et, plus malin encore, le retire avant qu'on l'ait digéré: dans la caverne audiovisuelle, l'ours est pervers, mais pas si mal léché que ça. Lundi à Nulle Part ailleurs (première partie: il aime y rappeler qu'il déteste la seconde), il arrive comme toujours avec des ventouses sous les yeux, un voile de barbe, la clope au bec et commence par refuser de raconter le film qu'il est venu vendre: la caricature est installée.
Il joue un peu avec, comme un chat, installant la menace qu'elle est censée représenter pour les animateurs: on doit croire que la première question venue va le rendre fou. Et quand Alexandre Devoise, le ravi rasé de service, lui demande: «On doit pas se fendre la gueule tous les jours avec vous?», il répond durement: «Ceux qui me connaissent se fendent peut-être la gueule avec moi et ceux qui ne me connaissent pas me posent la mêm