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Libération
Portrait

Spike Lee Laminoir.

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Spike Lee, 43 ans. Le réalisateur américain présente «Bamboozled» en vieux routier de la promo-provoc.
publié le 15 mars 2001 à 0h02

S'il était un nain, il serait Grincheux. D'ailleurs, il n'a pas l'air très grand. Il ne fait rien pour. Il est arrondi dans son fauteuil, le cou rentré dans les épaules, les yeux éteints derrière ses lunettes. Pas content d'être là, manifestement. A voir ses zygomatiques en berne, le pronostic est assuré: la rencontre va tourner vinaigre. Faute de réponse, les questions calent. On sort de là, un rien défait. Visage pâle. Est-ce ainsi qu'il vous regarde?

Son oeil est noir. Son pull est noir. Son humeur est noire. Il n'y a plus d'espoir... Spike Lee ne changera pas. Il a mis le pied dans la petite chapelle de la célébrité mondiale voilà tout juste quinze ans, c'était au Festival de Cannes. Il a suffi de deux films pour qu'il soit reconnu et soutenu par ce monde qui se savait trop blanc. Et puis ça s'est gâté. L'homme s'est cabré. Le gosse de la middle-class noire de Brooklyn, fils d'un musicien de jazz et d'une professeur d'art africain, a probablement eu peur de plaire et de complaire. C'est l'époque où les stars combattent la famine africaine en chantant «We are the world», une bouteille de Coca-Cola à la main. Il dit alors: «C'est Hollywood, c'est Walt Disney, c'est de la merde», et il a raison. Mais le voilà qui confond la distance avec l'arrogance. Il se met à ressembler à un frêle petit gars gâté et pressé qui voudrait faire passer ses caprices pour la grande colère de ceux qui n'entrent chez les Blancs que par la porte de service. Posture de rappeur, tendance Malcolm X p