Juste après une scène d'ouverture qui s'y entend pour tout de suite nous troubler tous les sens (où? quand? comment?), Millenium Mambo feint de se reposer dans la chronique d'un début de soirée entre jeunes à la table d'un restaurant de Taipeh. Un jeune magicien bavard fait des tours avec des pièces de monnaie. Le type est habile à escamoter l'argent d'une main à l'autre, ses copains sont médusés, les filles, rieuses. Hou Hsiao-hsien va-t-il nous entraîner dans le spectacle de quelques post-adolescents taïwanais? Oui, bien sûr et non, assurément.
Plan séance. Plus que jamais maître de marionnettes, Hou Hsiao-hsien est ce magicien qui n'est jamais là où on croyait dissimulé l'or de ses films. Cette fois, sa prestidigitation consiste à faire surgir un petit oiseau pâle: Vicky, jeune fille égarée, blanche Ophélie, qui se traîne entre son boulot dans une boîte de nuit et le petit appartement qu'elle partage avec Hao-Hao, désoeuvré de son âge, qui traficote avec la drogue. Vicky s'ennuie, boit beaucoup, fume énormément, et se laisse baiser par son amant en conjuguant ces trois semblants d'activité: lassitude, alcool et cigarettes. Mais comment filme-t-on un verre de whisky qui se vide, une cigarette qui se consume et une fille qui s'éteint, sans que le film soit lui-même un éteignoir? Réponse en 119 minutes de ciné-magie excitante.
Ni sociologue d'un milieu, ni hystérique de la jeunesse, Hou Hsioa-hsien met pourtant son film dans un état d'adolescence qui produit l