Comme si l'air du temps et les nouvelles du monde ne nous donnaient pas assez de raisons de désespérer du genre humain, voilà qu'on nous bassine depuis plus d'un mois avec un film dont l'esthétique publicitaire rétro, la poésie frelatée et le propos insignifiant masquent (à grand-peine) une vision de Paris, de la France et du monde (sans même parler du cinéma) particulièrement réactionnaire et droitière, pour rester poli. Et comme s'il ne suffisait pas que le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain ait bénéficié d'une tornade d'éloges quasi unanimes, comme s'il ne suffisait pas qu'une grande partie de la France constitue un front national du cinéma se masturbant l'identité avec l'image sentimentalo-passéiste que lui renvoie Jean-Pierre Jeunet, voilà que dans un Rebonds publié dans Libération (1), David Martin-Castelnau et Guillaume Bigot prennent la défense du film, tout ça parce que la sainte Amélie a été légèrement égratignée par une infime partie de la presse. Et les deux Don Quichotte d'opérette de condamner le mépris des intellectuels, la condescendance des élites, bref, de voler au secours de ce pauvre et fragile petit film qui n'a qu'un tort (aux yeux des intellos) selon eux, «regarder le petit peuple avec amour, empathie et espérance».
Il est peut-être donc temps de dire noir sur blanc, argumentaire à l'appui, tout le mal qu'on est en droit de penser de ce film, un droit qui devient même un devoir puisque la quasi-totalité des médias français, tétanisée et rendue aveugle par