Dès le départ, l'auteur nous prévient : ceci n'est pas une biographie d'Ali Farka Touré, le guitar-hero sahélien, mais «un paysage plus large, dont [il] serait en quelque sorte le carrefour». Et cette promesse, Marc Huraux la tient. Pendant 93 minutes, il nous promène sur le Niger, le long de ses berges, sur ses îles, parmi ses hommes, ses troupeaux et ses djinns. Pour qui connaît la région de Niafunké, au nord du Mali, c'est comme si vous y étiez. Cette sincérité est la principale qualité du documentaire. Le cinéaste est fasciné par les valeurs culturelles dont est pétrie la boucle du Niger.
Et quel destin que celui d'Ali Farka Touré ! Orphelin d'un tirailleur, élevé par sa mère puis «donné» à un marabout pour le compte duquel il est forcé de mendier, «Farka» s'échappe à 10 ans, alors qu'il se trouve à la frontière mauritanienne, et parcourt à pied des centaines de kilomètres pour rentrer chez lui. Puis ce sont deux années de désordres mentaux. Guéri, il se met à jouer de toutes sortes d'instruments, en particulier du violon monocorde, prélude à la fabrication de sa première guitare. On sait gré à Huraux d'avoir su remonter à la source spirituelle du musicien et à ce qu'il considère, lui, comme un achèvement : son travail pour la communauté paysanne de Niafunké.
Farka a pu obtenir la construction d'une station de pompage irriguant 9 000 ha, et l'émerveillement des cultivateurs locaux devant le miracle du riz en saison sèche dit assez l'importance de cette réalisation dans une