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Libération
Critique

Sur le fil, «Cécile Cassard»

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Autour du deuil difficile d'une jeune veuve, manifeste poétique de Christophe Honoré.
publié le 10 juillet 2002 à 0h21

Ayant à peu près totalement raté son passage cannois (dans la sélection Un certain regard), le premier film de l'écrivain Christophe Honoré sort dans un créneau estival difficile, comme l'an passé Trouble Every day de Claire Denis, déjà avec Béatrice Dalle. La parenté des deux films va d'ailleurs au-delà de ces considérations conjoncturelles. Identiquement nimbés de ténèbres et de malédiction, couvant en leur sein on ne sait quel mal vénéneux baudelairien qui menace à tout moment de vous éclabousser le visage, formalistes et dégressifs, ils travaillent (et sont travaillés par) le même désir de rompre avec toute psychologie, vraisemblance du lieu de l'action, sociologie des causes et des effets pour nouer avec le spectateur un pacte plus profond, une manière, forcément maniérée, de connivence des affects.

Un temps critique, Christophe Honoré s'était fendu en 1998, dans les Cahiers du cinéma, d'un texte ouvertement politique où il valorisait des cinéastes américains tels Lynch ou Ferrara pour stigmatiser le manque d'ampleur stylistique de la plupart des films français. En contre-exemple, il citait, avec une ferveur à l'époque bien solitaire, Ceux qui m'aiment prendront le train de Chéreau. Ainsi, dès le début de 17 Fois Cécile Cassard, on est à la fois perdu et en territoire connu : image floue d'un enfant rampant vers l'oeil de la caméra comme en souvenir de l'introït du Sombre de Philippe Gandrieux, plan d'arbres le long d'une route la nuit évoquant la course aveugle du génér