A Cannes, Apichatpong Weerasethakul, 32 ans, a fait sensation. Voici un cinéaste (appelons le «Jo» comme il le fait lui-même) en provenance de Thaïlande, produit par la compagnie française Anna Sanders Films (à la tête de laquelle on retrouve le producteur et cinéaste Charles De Meaux, qui comprend à son catalogue des films d'artistes comme Dominique Gonzalez-Foerster), doté d'une telle liberté qu'il se situe quelque part à la croisée du cinéma contemplatif, naturaliste, du porno et des installations d'artiste. Il fallait en savoir un peu plus sur ses motivations comme sur sa fantaisie. Rencontre via e-mail avec ce natif de Bangkok, qui a un temps étudié l'art à Chicago.
On ne vous connaît pas...
Je viens de Khon Kaen, une ville du nord-est de la Thaïlande, près du Laos. C'est laid, déprimant, mais la ville garde en elle certains fantômes qui me hantent. C'est dramatique, n'est-ce pas, mais c'est vrai. J'ai fait un premier film, Mysterious Object at Noon, et en venant le présenter à Paris j'ai revu Dominique Gonzalez-Foerster que j'avais déjà rencontrée en Thaïlande lors d'une expo d'art vidéo où elle avait découvert mon travail de vidéaste. C'est à Paris qu'est né Blissfully yours, et ma collaboration avec la société de production Anna Sanders Films, impliquée en cinéma et en art. En Thaïlande, j'ai une maison de production, Laong Dao Limited, dont la démarche est assez analogue.
Est-ce que «Blissfully Yours» a été confronté à la censure ?
Pendant le tournage, non. Nous étions