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Libération

Un Jupiter cool

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publié le 6 novembre 2002 à 1h41

Avec Aki Kaurismäki, on tient peut-être une vraie chandelle d'espoir pour éclairer la nuit abominable du règne de la promo. Le parcours qu'effectue le cinéaste finlandais pour accompagner la sortie de son dernier et merveilleux film l'Homme sans passé est un sans-faute de distanciation, de tact et, souhaitons-le, d'efficacité.

Difficile, évidemment, de se figurer le gaillard d'Helsinki en Clausewitz, se prenant longuement la tête dans des réflexions stratégiques avec consultants en «force de vente». Ses interventions sous le feu des médias sont brutes, spontanées, irréfléchies et cependant hautement réfléchissantes : de tout son flegme soiffard, Kaurismäki renvoie aux projecteurs du champ de bataille une lumière qui les aveugle et, à certains égards, les terrifie.

Sa montée des marches au dernier Festival de Cannes était exemplaire de cette indomptabilité de clown maladroit, qu'attestait encore son pied de nez à la cérémonie qui suivait («Je me remercie surtout moi-même»). A la télé, on ne l'a d'ailleurs vu véritablement à l'aise que lors d'une récente couillonnade chez Moustique-Delepine et la bande de Grosland, République dont le cinéaste a reçu le très rare et honorifique statut de citoyen d'honneur.

Du point de vue de son image, de sa réputation et de sa «communication», Aki K. est une sorte de David Bowie naïf. Tout aussi précurseur mais moins glamour, il joue, comme lui, à l'avant-garde : une avant-garde absolue, irrattrapable, définitive. Incapable de prendre au sérieux