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Libération
Interview

«Tu t'installes chez moi, en moi»

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publié le 13 novembre 2002 à 1h45

Werner Huppert-Isabelle Schroeter. Interchangeables, répondant ici à deux, comme il se doit, amitié de douze années. Dialogue façon Je t'aime, moi non plus entre celui que Jean-Jacques Schuhl, dans Ingrid Caven, surnomme «le Baron» («Je suis aussi le héros de dix romans pornographiques !»), l'aristocrate décadent du cinéma allemand depuis les années 70, et son actrice-alter ego.

Werner Schroeter. La première fois que je t'ai vue, c'était à Venise en 1980, tu ne m'as même pas remarqué.

Isabelle Huppert. Du tout, c'était à la Fenice, devant l'entrée. Et je t'avais remarqué ! C'est d'ailleurs difficile de ne pas te remarquer. Dix ans plus loin, tu m'as envoyé un scénario, celui de Malina.

W.S. Là, on s'est vu au bar du Lutetia, pour un essayage de costume : des petits chapeaux...

I.H. J'ai quand même pas essayé des costumes avant de lire le scénario ?

W.S. Il y a cinq ans, pour Poussières d'amour, je t'ai demandé de venir une journée sur le tournage...

I.H. Ah, oui, j'avais oublié ! Tu me fais toujours chanter dans tes films.

W.S. Tu chantes si gracieusement mal. C'est cette impression de tendresse qui renouvelle notre amitié depuis douze ans. Je me nourris de ta présence, mais pas d'une façon de vampire.

I.H. Si. Tu t'installes chez moi, en moi, sans te gêner, comme un démiurge.

W.S. Tu t'y prêtes avec plaisir. Notre relation, c'est le film comme une toile blanche : moi, je tiens le pinceau, toi, tu es la main avec ma main. On fait cette peinture ensemble.

I.H. Mais, le motif, je le pei