Après l'incursion chantante et haute en couleurs menée, à travers Topsy-Turvy (1999) dans le monde de Gilbert et Sullivan rois de l'opérette anglaise du XIXe siècle , Mike Leigh revient, avec All or Nothing, à des évocations plus contemporaines. En l'occurrence, une plongée dans la mouise prolétaire britannique. Moins divertissant ? Eh bien, franchement, ne dissimulons pas, à qui cherche à rigoler le temps d'une séance, qu'on peut trouver plus bidonnant.
Densité humaine. Mais, comme le rétorque le réalisateur lui-même, tout dépend de ce qu'on attend d'un film : «On peut aussi en espérer une expérience riche, une gamme approfondie d'émotions, de sentiments, et de réflexions.» Et, dans ce cas, oui, les voyages proposés par Mike Leigh font l'affaire. Qu'ils se situent dans un passé bigarré ou dans un présent grisâtre, leur richesse tient à la densité humaine qu'ils irradient, et non à leur cadre ou à leurs décors.
Reste que All or Nothing s'amorce sous des couleurs sévèrement révulsives d'une espèce de chronique de la veulerie ordinaire. S'y débattent deux femmes-courage, mamans-poules chacune à leur façon, contre la dérive malgracieuse de leurs couvées. Maureen la pince-sans-rire (formidable Ruth Sheen), roc d'énergie dont l'humour ne désarme pas face à son porc-épic de fille, ado coincée dans des amours imbéciles. Et Penny (Lesley Manville), caissière miniature affligée d'une famille poids lourd : son mari, Phil (Timothy Spall), est un mou gentil, chauffeur de taxi apathique