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Libération
Critique

Le Salon de musique

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publié le 10 décembre 2002 à 2h04

Pour ce film légendaire signé Satyajit Ray (à l'image) et Villayat Khan (à la musique), on donnerait volontiers l'oeuvre complète des sous-cinéastes qui se défoncent à la musique indienne, qu'ils soient abonnés à la secte du dalaï-lama (Bertolucci), à la confrérie des fumeurs d'encens (Corneau) ou aux grands météorologues de l'âme (Kaurismäki, Im Kwon-taek, Grandrieux). Dire d'abord que le grand maître d'Inde du Nord, Ustad Villayat Khan, est le plus lyrique des joueurs de sitar, le dernier à faire chanter ses cordes pour le seul plaisir d'Allah. En 1958, Villayat Khan jouait comme un dieu dans les immenses espaces sonores que lui laissait Satyajit Ray, renoirien jusqu'au bout des ongles (rappeler que, moins de dix ans plus tôt, Satyajit Ray faisait encore l'assistant sur le tournage du Fleuve, un Renoir lyrique, peinturluré, surestimé, mais un Renoir quand même).

Et l'histoire, dira-t-on ? C'est celle d'un aristocrate qui se ruine une dernière fois pour un dernier concert privé. En trois lignes, Lourcelles dit ce qu'il y a à dire, évoquant «le noir et blanc utilisé avec un luxe raffiné et discret, comme on ne le verra sans doute jamais plus, les lents mouvements d'appareil qui nous font pénétrer dans l'âme du personnage comme dans une ville dévastée et fascinante... et qui montrent un artiste au sommet de son art».

D'un Ray à l'autre, il n'y a qu'un pas, qu'on franchira demain avec Party Girl, le beau film de Nicholas Ray, qui vaut presque, en pure intensité narcissique, celu