1966. Enfant, nous sommes tous confrontés à des phrases énigmatiques. La mienne fut : «Bien que l'homme s'inquiète en vain, cependant il marche dans l'image.» Pour aller à la rencontre des images, je dois traverser une immense forêt, sombre, funèbre, le plus proche cinéma étant à plus de sept kilomètres. Ce que je vois sur l'écran ne m'intéresse pas trop. Mais avec un groupe d'amis nous nous en servons pour amplifier notre peur dans la forêt.
1976. Je m'installe dans une chambre de bonne à Paris. Je suis inscrit à trois facs en même temps. Tout se passe bien la première semaine, je descends les sept étages, tourne à gauche pour le métro. Jusqu'à ce que je découvre l'existence d'une salle de cinéma au bas de l'immeuble, à droite en sortant, le Cinéma national populaire. Avec une carte d'abonnement de 5 francs, cela donne accès aux trois séances du soir. Je découvre tout Murnau, tout Mizoguchi, je suis étourdi par le Gai Savoir, un inédit de Godard interdit par la censure. Il y a un épais cahier dans le hall d'entrée : les gens y inscrivent leurs désirs de voir ou revoir certains films. Je dévore ce livre d'envie d'images. Je ne vais plus en cours. J'ai trouvé mon Université. Merci à vous, Jean Collet, d'avoir inventé ce lieu fertile.
1978. J'essaie d'apprendre le japonais, après avoir vu les films d'Ozu, en particulier les muets. Je m'inscris dans une école de photographie.
1981. Voyage d'étude au Japon, sur l'art vidéo. Je m'aperçois qu'on m'a appris un japonais incompréhensibl