Menu
Libération

Sa maison sur son dos

Article réservé aux abonnés
La réalisatrice a rencontré un Père Noël à part.
par Agnès Varda
publié le 25 décembre 2002 à 2h16

Encore une fois, et d'autant que les fêtes sont là, on sent violemment le contraste entre ceux qui ont beaucoup et ceux qui n'ont rien. Ceux qui savent où rentrer et ceux qui sont dehors.

Tournage de Deux ans après : j'ai rencontré cet homme qui épluchait un artichaut, qu'il avait trouvé dans les restes du marché de Talensac à Nantes. Végétarien, il se préparait une salade avec des restes bien épluchés, qu'il plaçait dans une écuelle en plastique. Il nous a dit : «Le gâchis, c'est le non-respect de celui qui a travaillé pour le faire. Et c'est l'une des principales raisons pour lesquelles je récupère. Je me suis recyclé, si on peut dire, vers l'anticonsommation.»

Ce sont des mots inoubliables, ainsi que les yeux de ce très bel homme. Comme je lui demandais s'il habitait dans le coin, il m'a dit : «Je squatte, on n'habite plus maintenant, on squatte.» Il n'est pas le seul à n'avoir pas où aller dormir. Mais ces jours-ci, dans les catalogues de cadeaux, j'ai vu des «chambres à roulettes», des «Ballules». Il y a aussi, paraît-il, une chambre pliable, portable et gonflable en trois minutes qui vaut 3 110 euros TTC. Elle «permet de se sentir chez soi partout». Sans parler d'une «maison-valise» qu'on peut commander sur l'In ternet...

Je lis également qu'un architecte japonais a réalisé des abris en gros tubes de carton qui sont des maisons pour SDF. Etait-ce dans une exposition ou en a-t-il fait faire 2 000 qu'il a distribuées dans les rues ?... On me raconte aussi que, près d'Evry,