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Libération

Carlos Reygadas, 30 ans, visionnaire et terre-à-terre

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Rencontre dans la montagne mexicaine avec l'ex-avocat international pour qui le cinéma va de soi.
publié le 15 janvier 2003 à 21h48

Etat de Hidalgo envoyé spécial

Une vallée fertile au fond d'un ravin surmonté de montagnes arides. Paysages mexicains de cactus, de plants de maïs et de végétations jaunies par le soleil. Sous le cagnard, on ne croise qu'ânes, enfants à vélo et quelques rares paysans. Un silence impressionnant rôde, prisonnier de l'espace fermé de la barranca (le ravin) d'Ayacatzintla. Les bruits ­ un coq, un camion, une radio ­ éclatent net dans le silence, à des lieues à la ronde.

Eté 2000. Un jeune homme de 28 ans débarque dans cette zone perdue de l'Etat de Hidalgo, au centre du Mexique, pour tourner son premier long métrage : Japón. Carlos Reygadas, enfant et adolescent, a passé des vacances dans un village voisin, Velasco, et il ne connaît la barranca de mémoire. «Je suis venu une fois à 13 ans, une autre fois à 15 ans, en promenade avec ma famille, puis pour tourner. L'endroit m'avait impressionné. Je ne sais pas vraiment ce qui m'a plu ou marqué. Peut-être l'espace, ou le silence. Je me souviens simplement d'avoir pensé, dès l'époque : "Je ferai un film ici".»

Un jouisseur

Deux ans après le tournage, après s'être imposé avec Japón sur la scène internationale (caméra d'or à Cannes) comme l'un des cinéastes les plus prometteurs du moment, Carlos Reygadas marche à nouveau sur les pas de «l'homme» sans nom de son film, celui qui vient de Mexico pour se suicider dans ces montagnes. Sur le chemin de pierre tracé à flanc de montagne, Reygadas s'arrête sans cesse : une maison au loin, un rapace