Sans nouvelles de Manuel Pradal depuis 1997 et la sortie de son premier long-métrage, d'un éclat inédit, Marie Baie des Anges, on se demandait sur quel genre de champ d'honneur ce jeune cinéaste, né en 1968, était tombé comme tant d'autres avant lui. Puis, finalement, on entendit parler d'un tournage à Naples et sur les îles Eoliennes (Stromboli, Panarea, Lipari...) avec un casting américain chromé.
Grandiose. Puis, à nouveau, silence radio. Ginostra était perdu quelque part dans le labyrinthe d'une production coûteuse (15 millions d'euros environ) et pleine de turpitudes (le Studio Canal, bateau ivre de l'ère Messier). Le film sort aujourd'hui, cuirassé de ténèbres et de flammes, insidieux comme un népenthès baudelairien. Le cinéaste explique au terme de cet accouchement infiniment retardé : «J'ai l'impression d'avoir fabriqué quelque chose de plus vieux, plus mature, plus noir et dangereux que je ne le suis moi-même.» Les premiers plans, où la silhouette préhistorique d'un volcan se découpe dans la nuit, donnent le ton, le grandiose au dehors, l'étrangeté en soi.
Sur une trame de polar mafieux un flic du FBI, Matt Benson (Harvey Keitel, impressionnant), vient dans le sud de l'Italie pour interroger un enfant, Ettore (Mattia de Martino), rescapé d'un attentat commis par Cosa Nostra , Pradal invente un monde anxiogène où les personnages semblent pris au piège de leur propre culpabilité, hantés par des lâchetés, des crimes enfouis qui ne tardent pas à éclater le vernis de ju