C'est un film sur les parents. Pas forcément les nôtres. Des parents. Des vieux d'autrefois qui préféraient mourir plutôt que de se confier. Et d'ailleurs, parfois, ils en mourraient. Mais le secret n'est pourtant pas le sujet de Loin du paradis, le nouveau film de Todd Haynes. Car ce secret, comme tous les secrets de famille, est un triste secret de polichinelle. Même si, en l'espèce, Polichinelle en pince plus pour Pierrot que pour Colombine. La matière essentielle de ce film magnifique est ailleurs. Loin du paradis est une enquête sur le silence. Le silence d'hommes et de femmes de la moyenne bourgeoisie dans une ville américaine des années 50. Le silence comme organisation défensive, quitte à parler beaucoup pour ne rien dire.
A grand renfort de formules de politesse exagérées, l'américain de ce film est un babil qui fait beaucoup plus de bruit que de sens. Du bruit et du brouillard : le brouillard des apparences. En championne du fumigène, Cathy Whitaker, mère de famille accomplie, épouse irréprochable, beauté d'époque idéale puisque parfait mélange de Marilyn et de Grace Kelly. Autant dire un travelo. Comme toutes ses chères amies qui regrettent de ne pas avoir une deuxième bouche pour y mettre encore plus de rouge à lèvres. Mais les hommes aussi sont des travestis, maquillés en mari sportif, déguisés en cadre ardent. Même les domestiques noirs ont l'air de bondir d'une publicité pour machine à laver : plus blanc que blanc.
En silence. Todd Haynes considère ce bal des ma