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Libération
Critique

A trois dans la poisse, jusqu'à l'impasse

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publié le 16 mai 2003 à 23h01

L'attention portée au cinéma argentin ne mollit pas. La Croix du Sud, premier long métrage de Pablo Reyero, est un polar sec, d'une noirceur d'écume et de goudron, où les personnages ne savent faire qu'une chose : tout rater consciencieusement. Nora, Javier et son frère travesti, Wendy, sont chargés de transporter une livraison de cocaïne mais décident de la garder pour eux, d'en consommer une petite partie et de revendre le reste à bon prix.

Marigot. Javier est rapidement lâché par ses intermédiaires et se fait flouer par un dealer qui lui rachète le lot en solde. Réfugiés chez les parents de Javier et Wendy, deux détritus lessivés par la vie censés s'occuper d'une station balnéaire à la ramasse au bord d'une falaise, le trio se morfond, se déchire et se sépare avant d'être rattrapé par son destin, qui porte flingue et n'a pas de coeur.

Le niveau de poisse enregistré par le cinéaste est si épais à certains endroits de son marigot filmique qu'on voudrait tenter de fuir, mais le limon vous suce par le fond. On s'enfonce, patauge et crève la bouche ouverte, le film trace une ligne droite en direction d'une fin sinistre. Si Reyero avait mieux soigné son scénario, il aurait touché à la noirceur assommée d'un Jim Thompson avec ses personnages ne comprenant pas le quart de ce qui leur arrive, quelque chose pouvant rappeler aussi le Sang pour sang des frères Coen.

Coupe déréglée. La Croix du Sud bénéficie d'excellents acteurs, d'un décor naturel de bled océanique à l'abandon du meille