L'événement de la semaine est complexe à énoncer : s'exposent simultanément trois films (en salles) et une installation (en galerie), tous signés Chantal Akerman, «cinéaste, écrivaine, vidéo-artiste, ça m'est égal». D'Est est un travelling de Berlin à Moscou après la chute du Mur ; Sud évoque un lynchage raciste au Texas ; De l'autre côté, le passage clandestin et mortel de candidats mexicains à l'immigration aux Etats-Unis. Voilà pour la trilogie. Paradoxe : c'est d'abord l'installation qu'il faut voir du début à la fin. De la nuit noire au jour, on assiste à un «lever de parole» (comme on dit un lever du soleil) sur un écran qui blanchit jusqu'à disparition d'image, pendant qu'un récit s'égrène et se ressasse. Akerman fait rentrer en un carré blanc à la Malevitch le politique, la contrebande, les utopies de l'art, la langue, la fiction, la part de nous-même qui se sentira toujours étrangère à soi, l'expérience du paysage. Tout ce qu'on retrouve décliné dans la durée, le long des trois films on n'ose dire documentaires, tant le genre y est dépassé. Rencontre dominicale calorifère, chez elle, à Ménilmontant à Paris, où elle s'apprête à monter Demain, on déménage.
Combien y a-t-il d'installations pour «De l'autre côté» ?
Il y en a trois : celle que j'ai réalisée à la Documenta de Kassel (2002), celle de Rotterdam (2003) et la présente : Une voix dans le désert. Avant même de commencer le film, j'avais l'idée d'un écran élevé à la frontière de l'Arizona et du Mexique où serait projeté un fragment du futur film. Je voulais qu'un réci