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Libération
Critique

«Domaine» impérial

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Le Sri Lankais Lester James Peries adapte Tchekhov à la mélancolie locale.
publié le 27 août 2003 à 0h43

Au moment où tous cherchent à repérer le courant ou la vague qui va révolutionner la planète cinéma, il n'est pas sans intérêt de jeter un regard sur le dernier film de Lester James Peries, 84 ans, maître du classicisme asiatique. Le Domaine, film sri lankais, est aux antipodes du cinéma qui se fait aujourd'hui en Argentine, à Taiwan, en Thaïlande, ou même au Sri Lanka où un jeune rebelle est en train d'éclore, Asoka Handagama, qui, avec This is my Moon, a frappé les esprits par ses audaces formelles.

Evidence. Et pourtant, Lester James Peries fait exactement le même cinéma que ses jeunes collègues : il semble simplement avoir réussi à figer naturellement un passé que ses cadets plus expérimentaux recherchent à travers un mélancolique retour aux sources. Peries fait avec évidence ces films hypersensibles et nuancés qu'un Hou Hsiao-hsien ou un Edward Yang, par exemple, réalisent avec une nostalgie volontariste qui n'empêche pas la grâce.

Dans le Domaine, ainsi, l'émotion n'emprunte aucun détour, elle est palpable, frémissante, mais presque imperceptible. Dans la manière dont une mère cache sa peine à sa fille, dans la façon qu'a cette fille de prendre la main de sa mère, dans chaque mouvement de caméra qui, le long des escaliers, au seuil des chambres, sous les frondaisons du jardin, sur les chemins qui bordent le lac, suit les premiers pas des personnages.

Lester James Peries n'a pas changé sa mise en scène depuis des lustres, depuis les longs regards qui caressent les protagon