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Libération
Interview

Mes dates clés, par Jacques Doillon

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publié le 3 septembre 2003 à 0h49

Alors que Raja, avec Pascal Greggory et Najat Benssallem, présenté à la 60e Mostra de Venise (Libération du 30 août), sort en salles, Jacques Doillon livre ses datés clés.

15 mars 1944. Avant, j'étais pas rassuré, mais là, dès le premier instant dans cette grande salle de femmes allongées et d'enfants qui crient, j'ai peur de tout ­ et je ne parle pas des sirènes de la mairie voisine. Ça ne va plus me lâcher. Dans les jupes de ma mère et de ma grand-mère pour essayer de me calmer.

1950. Ma grand-mère me lâche, ma mère tient bon. Cinq ou six ans de réflexion pour me décider à rejoindre les jupes de mes cousines. Sauvé pour quelque temps.

1963. Des cinglés alcooliques en uni forme veulent ma peau. Je me retranche quarante-cinq jours dans l'hôpital militaire où je finis par leur échapper. Je deviens définitivement misanthrope, pas avec les femmes.

1974. Achat d'un jouet, six mois avant la naissance de l'enfant. Elle aura quelque chose de moi. Pourvu que ce ne soit pas un garçon.

1975. Naissance d'une fille. Angoisses nouvelles : peur de son pouls trop rapide, peur de sa bonne santé apparente. Le sentiment d'engrosser la mort, comme disait l'autre. Ça n'empêche pas des instants longs de bonheurs inouïs.

1978. Deux films, une Femme qui pleure avec Dominique et une Drôlesse avec Mado. Les films, ça fatigue, ça n'angoisse pas. Penser à continuer à en faire.

1982. Une autre fille. Elle aussi me va comme un gant. Penser à continuer à faire des filles.

1984. Une année à deux films (une Pirate