André S. Labarthe, 71 ans, est l'un des plus prolifiques cinéastes au monde. Ancien critique aux Cahiers du cinéma, cousin de la nouvelle vague, collaborateur régulier, pour la télévision, de Cinéma Cinémas ou d'Un siècle d'écrivains, il dit ici ses quatre vérités sur la série de portraits, Cinéastes de notre temps (devenue Cinéma, de notre temps), qu'il a fondée en 1964 avec Janine Bazin.
Bientôt, «Cinéastes de notre temps» aura 40 ans. Vous allez fêter ça ?
Au lendemain de la mort de Janine ? Vous plaisantez ! D'ailleurs, aucun signe ne permet d'affirmer que la collection atteindra son 40e anniversaire. Le Ferrara qui est diffusé ce soir a peut-être la voix enrouée d'un cygne à l'agonie. Ni moi, ni sans doute Arte, producteur actuellement de la série, personne ne peut dire combien il y aura encore de portraits dans la série. Nous vivons au jour le jour. C'est un scandale et, sûrement aussi, une nécessité...
Surtout une position inconfortable : ne rien savoir de l'avenir d'une série dont on s'occupe...
C'est pourtant la garantie de notre indépendance. Comment pourrait-on interrompre une collection qui, à aucun moment de son histoire, n'a eu d'existence juridique ? Nous avons toujours été dans une économie de survie, c'est bien ainsi. Rétrospectivement, on prend conscience du chemin parcouru.
C'est une sorte de «vie de famille» du septième art que vous proposez...
Et quelle famille ! De Buñuel à Ferrara, en passant par Akerman et Cassavetes, Hitchcock et Cronenberg, Ford et Hou Hsiao-hsien, Pasolini et Lynch, Vigo et Godard, Moretti, Melville, Lang, et tous les «R» : Renoir, Rouch, Rohmer, Rivette. Plus d'une centaine de portraits dans la «famille», je pense. Sans parler de ceux qui ont réalisé ces films, ces «ex