Menu
Libération

Le rôle déterminant de sa voix

Article réservé aux abonnés
Décryptage d'une tessiture et d'une diction inimitables.
publié le 8 octobre 2003 à 1h18

«Tu n'es pas pour moi que Rodrigue ou Hombourg ou Lorenzo. Tu es le seul comédien de la jeune génération d'après guerre qui ait compris sentimentalement le problème populaire», dit un jour Jean Vilar à celui qui était entré au TNP en 1951, décuplant d'emblée de toute sa présence faite de songes et de musiques intérieures la magie des nuits à Avignon dans la cour d'honneur du Palais des Papes. Dans les neuf années qui avaient précédé cet «engagement» (dont le contrat noir sur blanc dactylographié est l'une des pièces maîtresses de l'exposition de la BNF), Gérard Philipe avait joué neuf fois au théâtre et notamment l'ange selon Giraudoux dans Sodome et Gomorrhe, aux côtés d'Edwige Feuillère, en pleine guerre. Puis, à l'automne 1945, le fameux Caligula d'un Albert Camus qui deviendrait son ami, et mourrait un an après lui, jeune aussi.

Un peu nasillarde. Hormis les costumes et maquettes de Léon Gischia ou Edouard Pignon, qui rappellent mélancoliquement la silhouette de celui qui, au TNP, fut aussi Ruy Blas ou Richard II, hormis les photos de plateau d'Agnès Varda, demeure et perdure un nombre impressionnant d'enregistrements sonores. Là revient, comme si elle faisait encore partie de notre paysage, d'une mémoire toute prête à affleurer pour n'avoir jamais été réellement enfouie, la voix de ce même Gérard Philipe que des enfants encore reconnaissent comme le conteur de Pierre et le loup ou l'aviateur-narrateur du Petit Prince.

La tendresse. C'est peut-être le premier mot qui surgi