Sortant la même semaine que In This World, De guerre lasses a, comme le film de Winterbottom, été primé à la dernière Berlinale, où il a reçu le «prix du film de la paix», trophée que les esprits méfiants risquent de trouver décourageant de nunucherie humanitaire affichée. Pourtant, comme le film de Winterbottom, mais là sur le mode documentaire, le film de Laurent Bécue-Renard se distingue par l'extrême sobriété qu'il met à communiquer la proximité de ces expériences «extrêmes» l'émigration clandestine, les ravages de la guerre que l'éloignement et la distorsion de la virtualité télévisuelle nous ont habitués à prendre pour «étrangères».
Ce film de deuil commence par des sourires de femmes : la gaîté bienséante, un peu timide et poliment joviale, d'un groupe de jeunes femmes emménageant avec leurs enfants dans ce qui ressemble à un grand chalet d'accueil et qui sera, durant un an, le cadre de leur «thérapie». Tourné à Srebrenica, à l'issue du conflit bosniaque, De guerre lasses ne s'attarde pas sur l'histoire, le cadre ou les dégâts matériels des combats, mais explore ces stigmates invisibles, et plus mortifères encore, que la guerre imprime au coeur des survivants.
Ces femmes qui ressemblent à nos voisines ont perdu leurs maris, vu leurs proches massacrés, entendu les soldats serbes les inviter à choisir entre leur propre vie et celle de leurs enfants, senti l'odeur des bouts de chair humaine brûlée au briquet pour être mangée... Des horreurs qu'on apprend de leur bouche