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Libération
Critique

La «Bouche» en choeur

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Alain Resnais adapte «Pas sur la bouche», une opérette de 1925 pleine d'allégresse et de bourgeoisie embaumée.
publié le 3 décembre 2003 à 2h10

De même qu'avec Mélo, Resnais conviait le spectateur à la représentation d'une pièce de Henry Berstein pour laquelle «son» public ne se serait probablement pas déplacé si elle avait été montée dans un théâtre, Pas sur la bouche (1) réactive ce jeu de distorsion élégamment anarchiste que le cinéaste introduit dans les échelles du goût, du beau et du bon. C'est une expérience étrange en effet que d'assister in extenso à une opérette française créée aux Nouveautés, en 1925, signée d'un duo vedette de l'époque André Barde (paroles) et Maurice Yvain (musique) dont le style musical, le langage, les allusions, l'humour à la grivoiserie fanée risquent fort de laisser nombre de contemporains indécis sur le sens à donner à ce rituel.

Alain Resnais, lui, n'y voit pas anguille sous roche, le music-hall l'a toujours passionné, il a découvert cette opérette dans le texte, non sur les planches, et c'est le compositeur Bruno Fontaine qui lui a joué la partition au piano. L'envie de faire le film est donc venue, simplement, de l'entrain créé par la pièce et le casting a suivi dans ce même désir d'allégresse littérale.

Comédie des émois. Pourtant, ces personnages, aussi vivants que le cinéaste et sa troupe les aient voulus, ne sortent jamais de leurs riches intérieurs bourgeois et, quand ils désertent une pièce, leur corps disparaît du plan comme font les fantômes. Pas sur la bouche agit ainsi comme une résurgence comateuse, des hommes et des femmes sont là qu