Alain Resnais, 81 ans, reçoit dans les locaux d'Arena films, dirigée par Bruno Pesery qui le produit depuis Smoking/No Smoking. Entretien feutré sur son film opérette et ses prédilections musicales.
La dimension expérimentale de votre nouveau film échappe à première vue, on ne voit pas forcément l'enjeu d'une telle adaptation ?
C'est un film qui peut entraîner, en effet, beaucoup de malentendus. Dans les entretiens, on est obligé d'être sérieux, de trouver des motifs lourds de sens à quelque chose que l'on a voulu faire dans la légèreté. On me demande pourquoi je n'ai pas pris un chef-d'oeuvre classique, Pelléas et Mélisande ou Cosi fan tutte. Si on ne prend pas ce film avec bonne humeur ou une âme d'enfant, on reste en dehors. Ce qui m'excitait avec l'opérette de Barde et Yvain, c'était de la tourner en faisant mon casting d'acteurs sans me préoccuper de leur capacité à chanter mais en sachant que l'on ne recourrait pas à des voix en playback de «vrais» chanteurs. Je voulais que les acteurs chantent vraiment. Au début, Lambert Wilson excepté, ils pensaient tous que c'était impossible. Ils ont travaillé avec le compositeur Bruno Fontaine et, en s'entraînant, ont fini par se prendre à cette règle du jeu. Le film entend lier avec le spectateur, à travers les conventions d'un genre désuet, une sorte de connivence joyeuse.
Comme dans On connaît la chanson, la mise en scène joue d'un passage fluide du parler au chanter.
Normalement, on joue, on chante et on rejoue dans un même mouvement, le même plan. Ce n'est évidemment pas la solution de facilité, toutefois, c'est aussi ce qui nous amusait. C'est assez excitant d'être pris par les mailles du filet de la musique. Le tournage s'est déroulé dans la bonne hu