Peur sur le cinéma, sonnettes d'alarme tirées comme on sonne les cloches aux heures des invasions ennemies, angoisse du cinéaste devant le mutisme du CNC et autres stress de la production indépendante, ce bruit de fond anxieux aura accompagné l'année 2003. Pourtant, de plus en plus de films ne correspondant pas aux critères d'exploitation mainstream parviennent sur des écrans plus que jamais «art et essai» : No pasaran, Album souvenir, les Jours où je n'existe pas, Shimkent Hotel, Mon voyage d'hiver, les Semeurs de peste, le Monde vivant... Chacun de ces films réinvente à sa façon la possibilité d'une marge, y compris au sein d'un système souvent implacable, tout indexé qu'il est aux chiffres du box-office.
Le premier film de Claire Doyon, les Lionceaux, relève absolument de ce mouvement alternatif qui n'en est pas un, plutôt une sorte de rhizome deleuzien poussant par tous les bouts sur le territoire finalement beaucoup moins asséché qu'on le dit de la production française.
Voguant au gré d'une inspiration foldingue de mangeuse de lotus décadentiste, Claire Doyon invente le cinéma à voile, comme on dit «planche», «char» ou «vol». Le spectateur s'agrippe où il peut, entre bastingage-Cocteau et proue-David Hamilton, le film tangue dans le bleu, l'écume blanche.
Convoitise. Sur le ponton, deux flibustières en tulle et soie, un moussaillon naufragé, une naïade rock (Dani), un Achab pop (Jacno). Les deux adolescentes, toute libido à l'air, veulent Gustave, l'aînée l'emporte, la cad