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Libération
Critique

Une vie à la hauteur

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«The Station Agent» filme l'Amérique des laissés-pour-compte sans bons sentiments.
publié le 24 décembre 2003 à 2h26

Noël aidant, et son cortège de jolis sentiments distribués en flocons d'humanité béate, il s'en faudrait de peu pour que The Station Agent, film en quête de bonheur et visant une certaine compassion, n'apparaisse un rien superfétatoire. A priori, la bûche de trop sous la forme d'un film américain qui envisage de bien se tenir. Avec tout le soin gnangnan que peut avoir un film américain quand il a décidé de sauver la face sempiternellement limite de toute une nation de freaks ­ nains, femmes artistes, culs-de-jatte, serveuses de saloon, vendeurs de frites. Cela devrait suffire à nous faire passer notre chemin : c'est les fêtes... mais il ne faudrait quand même pas surestimer notre bonté.

Utopie. Ce serait une erreur. Car il se trouve que The Station Agent est un bon film. Parce qu'il avance précisément avec la conscience que le sol esthétique qu'il foule (celui de la gentillesse) est le plus miné d'entre tous, qu'il n'y a pas plus hollywoodien que la prime aux monstres pleureurs en tous genres. Or, l'acteur Peter Dinklage, même s'il est formidable, n'encourt pas l'oscar du meilleur nain faisant le nain, et la terre glaise malaxée ici est l'Amérique des laissés-pour-compte. Surtout, ce film a le bon goût de prendre vite la tangente en direction de ce qui l'intéresse vraiment : une utopie un peu loin de tout et du reste, un Never never land où les gens réaliseraient que la meilleure façon de vivre, c'est de respecter les autres en leur foutant une paix royale. The Station Agent