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Libération
Critique

Les sens de la famille.

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A l'affiche. Après «Mère et fils», Sokourov poursuit son étude de l'amour filial avec l'ambigu «Père, fils», au ton mystique et à l'érotisme martial.
publié le 21 janvier 2004 à 22h09

Le Jour de l'éclipse est sorti en novembre 1992, soit quatre ans après son achèvement. C'était le premier film d'Alexandre Sokourov à être distribué chez nous. Il avait alors 41 ans et déjà plusieurs oeuvres inédites à son actif, dont la Voix solitaire de l'homme (1979), son film de fin d'études au VGIK (Institut des hautes études cinématographiques de Moscou).

Il y a dix ans personne n'aurait pensé que ce cinéaste élitiste, enfermé dans son bastion esthétique de Saint-Pétersbourg (ex-Leningrad), produisant à la chaîne des épopées non narratives, délicatement chlorotiques, apothéoses malades broyant du noir, aurait eu les honneurs répétés de la compétition cannoise, et finirait par connaître un vif succès international avec une Arche russe, tournée en un seul plan séquence virtuose dans le musée de l'Ermitage. Curieux destin, reconnaissance tardive récompensant un travail, il est vrai, considérable : une vingtaine de documentaires expérimentaux et une douzaine de longs métrages de fiction.

Remugles du siècle. La hauteur de ton et de vue de Sokourov, son mépris des bassesses du monde, son culte de l'Art, qu'il ne conçoit pas sans majuscule, ont pris avec le temps des accents politiquement périlleux. Son soutien à Poutine et à ses manoeuvres désastreuses en Tchétchénie (dans un texte cosigné par Alexei Guerman et Nikita Mikhalkov), avait surpris, suscitant notamment un texte furieux de Léos Carax dans Libération (le 20 avril 2000). Ensuite, son film sur Hitler e