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Libération
Critique

Une saison en enfer

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Retour de Tian Zhuangzhuang avec le touchant mélodrame «Printemps dans une petite ville».
publié le 21 janvier 2004 à 22h11

En 1992, Tian Zhuangzhuang signait le Cerf-volant bleu, évocation critique du grand bond en avant de la Révolution culturelle, qui déplût aux autorités chinoises. Le cinéaste fut inscrit alors sur une liste noire l'empêchant de tourner pendant un an. Figure de la cinquième génération ­ aux côtés de Zhang Yimou ou Chen Kaige ­, constamment en lutte avec la censure, auteur notamment du Voleur de chevaux (Daoma Zei, 1986) que Martin Scorsese avait désigné comme le meilleur film des années 90, Tian Zhuangzhuang n'avait plus tourné depuis dix ans. Il a continué à évoluer dans le milieu du cinéma, soit comme producteur du jeune cinéma émergent (So Close to Paradise de Wang Xiaoshuai ou Au sud des nuages de Jiu Wen, encore inédit), soit comme enseignant à l'Institut du cinéma.

Printemps dans une petite ville est le remake d'un classique de 1948, Xiao cheng zhi chun, de Fu Mei, désormais considéré comme un des chefs-d'oeuvre de la production de cette période. Le film de Tian est lui-même splendide à tous égards : scénario (de l'écrivain Ha Cheng, d'après le script original de Fu Mei), acteurs, lumière (par l'immense chef opérateur Mark Lee Pingbin, compagnon de travail de Hou Hsiao-hsien), musique et mise en scène.

Frustrations. Au lendemain de la guerre, 1946, «dans une petite ville» du sud de la Chine, la maison des Dai est une grande demeure ancestrale, délabrée. Le jeune maître des lieux, Dai Lyan, est un homme souffrant qui s'est persuadé qu'il devait se ménager à l'extrême pour