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Libération
Critique

Arrivederci utopie

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publié le 4 février 2004 à 22h47

Il est difficile de ne pas rapprocher le film de Marco Bellocchio, Buongiorno, notte, de celui de Bernardo Bertolucci, the Dreamers, tous deux présentés au festival de Venise en septembre et qui ont suscité de nombreux commentaires passionnés dans la presse transalpine. Bertolucci, né à Parme en 1940, Bellocchio, né à Piacenza en 1939, sont de la même génération, celle du «nouveau cinéma», passés par l'ultragauche, et ils ont choisi de revenir en même temps sur cette période décisive de radicalisation politique et d'utopie révolutionnaire de leurs années 70.

Il s'agit dans les deux films de huis clos, mais ce qui chez Bertolucci resurgissait sous la forme d'un trio sexuel de jeunes bourgeois livrés

aux dérèglements de tous leurs sens, se fixe chez Bellocchio en tableau clinique de la violence puritaine des brigadistes rouges. 1968-1978, d'un film à l'autre, dix ans ont passé et avec eux les espoirs de fraternité et d'abolition de l'injustice de classe. La partouze a tourné vinaigre et, avec elle, la croyance dans le brassage social et les lendemains qui chantent. La jouissance n'est plus à l'ordre du jour, laissant libre voie, d'un côté, à la restauration petite-bourgeoise et, de l'autre, aux ultimes déchaînements meurtriers d'une fraction de porte-parole d'un marxisme devenu communisme mystique et désespéré.

Action d'éclat. Dans ces années-là, les brigadistes se faisaient embaucher dans les usines et tiraient au revolver dans les jambes des contremaîtres. Le soulèvement popula