Menu
Libération
Critique

L'Iran à cran

Article réservé aux abonnés
Quatrième film de Jafar Panahi, «Sang et or» dresse autour d'un braqueur un état des lieux lapidaire de la société iranienne.
publié le 25 février 2004 à 23h24

Un homme masqué déboule dans une bijouterie, poussant à l'intérieur le proprio qui vient à peine de lever le rideau de fer. Il est armé, il veut les bijoux, il parle de pierres bleues qui étaient dans la vitrine et qui maintenant sont dans un coffre. Le bijoutier est récalcitrant, il déclenche l'alarme, le voleur s'énerve, le tue à bout portant. La grille de l'entrée s'est refermée automatiquement, le voyou est pris au piège, des badauds à l'extérieur s'approchent, il les traite d'abrutis, de salauds, il se dandine d'un pied sur l'autre, lève les yeux au ciel et se tire une balle dans la tête.

C'est Abbas Kiarostami qui, un jour, a raconté ce fait divers à son ami Jafar Panahi, un hold-up qui tourne mal et un voleur qui se suicide pour ne pas se livrer aux autorités. Panahi a trouvé que c'était un bon début pour un film, qu'on pouvait tenter d'imaginer le parcours de ce type, savoir comment d'étape en étape il en arrive à ce coup d'éclat fatal. Kiarostami était partant pour écrire scénario et dialogues. Le résultat est carrément emballant. Présenté en fin de Festival de Cannes, à l'heure où les spectateurs repus ont peine à garder les yeux ouverts, le film est parvenu à sidérer l'assistance, raflant au passage le prix du jury Un certain regard. Il faut dire qu'avec Sang et or, Panahi va pour la première fois vraiment à l'essentiel, sans passer par quelque artifice rhétorique.

«Tous des tordus»

Sang et or nous colle au train d'un duo de losers de Téhéran, Hussein et Ali, deux li