«Tout ça pourquoi ? Pour être hué à Cannes. Super.» C'est avec ces mots, désabusés mais bien, que Vincent Gallo recevait Libération le 24 mai 2003. La veille, il avait déclenché une guerre intestine mêlant, dans un brouhaha de réfectoire, une internationale de journalistes accrédités. Pour cela, le gosse beau à la caméra n'avait eu besoin que de projeter son second film, The Brown Bunny. Projet minimal qu'il décrivait sommairement quelques mois auparavant au magazine Vibrations comme un «road movie porno». Ce qui, devant un festival autant lessivé qu'en manque d'émois critiques, ne devait pas manquer de faire son petit effet.
Parasité à Cannes. Comme prévu, la séance une fois entamée, un contingent de journalistes italiens surchauffés faisait la claque, parasitant chaque séquence, sifflant et commentant à voix haute et à grand renfort de «va'fanculo» toute tentative d'installer le film dans sa durée. Gênant. D'autant que The Brown Bunny est, pour le coup, un vrai road movie hypnotique dont nous serions les passagers (envoûtés). Et que, question porno, si le garçon n'avait pas menti, il joua aussi avec nos nerfs (LA scène arrive aux trois quarts du film). La patience n'étant pas le fort des festivaliers, la bronca s'éternisa : l'ennui, c'était eux.
D'autant que les reproches faits à Gallo ne pèsent pas lourd, si on les regarde de près : le carton générique («un film de Vincent Gallo, produit, écrit, réalisé et monté par Vincent Gallo»), qui à lui seul eut le talent de déclenche