Il y eut la mémoire du cauchemar, il y aura la mémoire du rêve. De cette Mémoire obstinée (titre d'un documentaire de 1997) qu'il travaille depuis 1973 pour rappeler ce que fut le cauchemar chilien sous Pinochet (le Cas Pinochet, 2001), Patricio Guzman exhume l'épisode précédent, «ce rêve radieux» du jeune cinéaste qu'il était alors et de tout un peuple qui, en 1970, installa au pouvoir Salvador Allende.
Après des années consacrées à dresser un réquisitoire cinématographique contre le coup d'Etat et la dictature de Pinochet (la Bataille du Chili, 1973-1979), Guzman se devait de composer une épitaphe au fondateur du Parti socialiste chilien. A cet homme qui a marqué sa vie et innervé son travail de cinéaste. C'est fait aujourd'hui avec ce portrait de Salvador Allende, suicidé en son palais le 11 septembre 1973.
Guzman puise la matière principale de son documentaire dans des images d'archives et dans son fonds propre de cinéaste (plus quelques images du Néerlandais Joris Ivens, autour du «train de la victoire» qui amena Allende aux marches du pouvoir). Des films que Guzman avait tournés alors qu'il revenait au pays, son diplôme de cinéaste en poche. Sa jeunesse est celle des Chiliens qui semblent naître à la démocratie, à l'espoir d'une justice sociale avec l'élection d'Allende. Il filme en noir et blanc les foules en liesse, les visages empourprés de certitudes. Et l'acteur de cette «révolution pacifique», homme replet avec de grosses lunettes. Pas vraiment un Che Guevara, le h