«Filme-moi mon frère, emmène-moi loin d'ici.» Se laisser fraternellement filmer pour se faire transporter, a-t-on jamais entendu plus belle définition du cinéma ? Mais cette injonction prend dans Mur, le sensationnel documentaire de Simone Bitton, une autre valeur puisque c'est un Palestinien qui la profère, alors qu'il est train de franchir ce nouveau mur de la honte que les autorités israéliennes sont en train d'ériger pour, disent-elles, se protéger du terrorisme. Ce dont ont l'air de douter quelques citoyens israéliens vivant à proximité de cette aberration, ainsi que le général Amos Yaron, directeur du cabinet du ministre de la Défense, et, à ce titre, responsable de la construction, qui, interviewé, en rajoute tellement dans les justifications qu'on finit par en rire.
Pacifiste.
Ce qui est visible à l'image, c'est qu'à l'exception de quelques zones décrétées de haute sécurité, où s'exhibe le dernier cri de la surveillance électronique, ce mur est souvent franchissable. Ce qui laisse penser que son but n'est pas tant de sécuriser que d'humilier. La peine physique est là, filmée de près par la caméra de Simone Bitton, et surtout dans la durée. Parce que tout est une affaire de temps dans cette histoire de fous. Le temps qu'il faut pour sauter le mur : cinq minutes quand on est un jeune Palestinien, nettement plus longtemps quand on est une vieille dame ou une mère de famille. Le temps nécessaire à un jeune troufion israélien pour mortifier des civils palestiniens à un post