Comme un radeau au milieu des chantiers de la rue d'Aubervilliers, la maison des Médias libres semble résister, depuis plus d'un an, aux vagues d'urbanisation bobo de ce quartier parisien du XXe arrondissement et à celles de la mondialisation ambiante. Le bâtiment, qui appartenait à la SNCF, est occupé depuis janvier 2003 par une radio locale (Fréquence Paris Pluriel), une télé nationale (Zalea Télé) et Co-errances. Cette société coopérative d'intérêt collectif (Scic) a déjà à son actif un catalogue de revues, de livres, de disques, de vidéos et de films qu'elle édite et distribue, via des réseaux alternatifs, à ceux régis par ce qu'on appelle ici l'industrie culturelle. «Nous ne faisons que perpétuer la tradition des coopératives ou comités d'entreprise ouvriers, explique Christophe Yggdre. Pour résister à la concentration extrême des industries culturelles.»
«Rotation lente». Le jeune homme est l'un des sept permanents que compte aujourd'hui la coopérative. Permanents encore largement bénévoles mais nourris des lectures de Bourdieu («La diffusion commande la production, imposant une véritable censure par l'argent»), Deleuze («Ce qui intéresse les distributeurs, c'est la rotation rapide, régime du best-seller...») ou des films de Peter Watkins («... l'impact dévastateur des mass medias audiovisuels sur l'homme, la société et l'environnement»). Co-errances en a tiré ses conclusions très pratiques en créant sa société alternative, une sorte de «marché noir» culturel.
La société