«Je suis venu au cinéma, gamin, parce que j'étais nul à l'écrit. Je me disais : y a des scénaristes, je n'aurai pas besoin d'écrire.» Le paradoxe, évidemment, c'est que François Dupeyron, 54 ans, a écrit ses sept films. De Drôle d'endroit pour une rencontre, en 1988, à cet Inguélézi, dernieren date qu'il a même écrit sous deux formes différentes : comme un roman et comme un scénario. Avec cet ultime projet, Dupeyron ne joue pas au jeu, devenu familier, de l'adaptation classique d'abord le roman, ensuite le film , ni à celui de la «novellisation» d'abord le film, ensuite le roman , qui ne sont que des manières de fabriquer des produits dérivés du succès. Il s'agit plutôt de deux expériences emboîtées, enchâssées : comment un roman et un film du même nom, Inguélézi, peuvent, aux moments successifs de leur conception, se nourrir l'un l'autre, se désirer mais aussi se repousser.
Un coffre pour refuge
S'il a voulu écrire et filmer ainsi, c'est qu'une drôle d'histoire s'est imposée à lui : «Ça m'est littéralement tombé dessus à l'automne 1999, pendant le tournage de C'est quoi la vie?» Un fait divers, entendu un soir à la radio, vu le lendemain à la télé, relu dans un journal: un Kurde qui, dans le sud de la France, trouve refuge dans le coffre de la voiture d'une femme après l'accident du camion qui le transportait clandestinement en Angleterre («Inguélézi» en kurde, donnant son titre au double projet). Perdu, ne sachant pas un mot de français, il parvient à apprivoiser cette