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Libération
Interview

«Enfant, la salle était mon pays»

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Le critique américain Jonathan Rosenbaum, récemment traduit, raconte sa vie de cinéphile :
publié le 9 juin 2004 à 0h58

Depuis presque vingt ans, Jonathan Rosenbaum tient la chronique des films au Chicago Readers (1). Considéré comme l'un des meilleurs critiques américains, il publie en France dans Trafic. Son livre, Moving Places, un classique outre-Atlantique, vient d'être traduit chez POL, sous le titre Mouvements. La soixantaine ronde et un peu pirate, il raconte le cinéma comme «le paysage de [sa] vie».

Quel cinéphile êtes-vous ?

Ma cinéphilie, c'est mon environnement familial : j'ai grandi dans une petite ville d'Alabama où mon grand-père dirigeait un cinéma. Ma cinéphilie s'est accrochée à ces lieux, ces vieux cinémas des villes du Middle West, leur salle unique, les décorations, les fauteuils, les frontons, et ceux qui les faisaient fonctionner. Mon amour du cinéma s'est enroulé autour de ces lieux comme une plante autour d'un tuteur. Dans le cinéma de ma famille, on passait tous les films, excepté ceux d'Universal, qui étaient chez le concurrent, où je n'avais pas le droit d'aller. Je me souviens d'une orgie de films : c'était les années 50 et ce qu'on pouvait voir était merveilleux. Mon enfance s'est passée là, comme ça, j'avais une douzaine d'années et j'ai été élevé par ces films et leurs acteurs. La salle était devenue mon pays. Ce n'est que plus tard, quand je suis monté à New York pour mes études, que j'ai pris conscience que le cinéma n'était pas seulement une maison et les films des amis : le cinéma était aussi un art. Le cinéma est toujours resté le paysage de ma vie.

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