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Libération

«Rahan», la pré-histoire

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publié le 16 juin 2004 à 1h05

Nos innocentes années 70. Le vieux Pif Vaillant devient Pif Gadget. Ledit gadget monté puis cassé (durée de vie moyenne du télescope en carton : deux heures), vous vous jetiez sur les histoires dessinées. Entre les «glop glop» d'un Pifou et le karaté de Docteur Justice : Rahan. Ce costaud en caleçon à fourrure poussait un grand cri («Raaahaa» !) quand il déchirait le ventre d'une grosse bête hostile de son coutelas d'ivoire (en pur plastoc, gadget n° 354). Et le blondinet au collier à cinq griffes de se demander, toujours à la troisième personne, où donc le fils de Craô pourrait aller traîner ses guêtres en peau de mammouth. Dans le grand désert mondial des temps aurignaciens (densité moyenne : 1 homme pour 100 km carrés), mieux valait ne pas aller cueillir des baies trop loin de son camp.

Blonde métaphore. Rahan, guerrier solitaire inventé par René Lécureux et dessiné par André Chéret en 1969, faisait tourner son coutelas à la fin de chaque aventure pour mieux retrouver les hommes, «ceux qui marchent debout», dans le numéro suivant. Et les pousser inlassablement vers le progrès. Blonde métaphore d'une humanité solidaire et ingénieuse, Rahan n'eut de cesse, au long des 183 histoires originales parues entre 1969 et 1993, de marteler son message civilisateur. A ses beaux jours, Pif Gadget, publication pilotée par le Parti communiste français, machine de guerre idéologique et alternative au grand Mickey américain, s'écoulait chaque semaine jusqu'à 500 000 exemplaires. Lécureux n