Le sujet n'est peut-être pas super sexy mais il est décisif : il concerne notre prochaine numérisation, notre devenir digital, notre passage à l'âge des zéros et des uns. Si le cinéma nous constitue, alors il faut se faire à cette idée : nous dérivons avec lui vers le continent inévitable du tout numérique.
Depuis les grandes prophéties de George Lucas qui déclarait, il y a cinq ans, qu'il serait le pionnier de l'irréversible bascule du support film vers le support informatique, un vaste puzzle industriel se met en place qui accompagne (ou parfois contraint) le cinéma dans sa mutation. Une pièce cruciale de ce puzzle tarde pourtant à se mettre en place : la projection numérique en salles. Or c'est sur ce front ultime, verrou déterminant du système et de son amplitude, que les choses commencent à bouger. La projection numérique, c'est sans doute la perspective de considérables économies d'échelle pour les agents de l'industrie : aux yeux d'une major, c'est la possibilité d'épargner les millions de dollars annuellement consacrés à la duplication des copies film et à l'expédition des bobines, la projection se faisant par satellite, via Internet ou sur des DVD spéciaux (1). Mais la projection numérique, c'est aussi la clef de voûte d'un bouleversement possible dans la fabrication et la diffusion du cinéma.
L'équipement mondial est pour l'instant infime. On recenserait environ 150 salles équipées aux Etats-Unis et à peine 200 en Europe (dont les trois-quarts en Grande-Bretagne). De