La revue Trafic fête son cinquantième numéro par une volumineuse édition de textes inédits tournant autour d'une question terrifiante : «Qu'est ce que le cinéma ?» Ce fut le titre, bien sûr, des volumes canoniques (parus entre 1958 et 1961) d'André Bazin («... pas tant la promesse d'une réponse que l'annonce d'une question que l'auteur se posera à lui-même»). Mais, comme l'écrit André S. Labarthe dans une lettre retour à l'envoyeur un peu vive, c'est aussi possiblement une impasse théorique : «Au fond, la force de la question ne lui viendrait-elle pas de ce qu'elle est irrepérable sur le spectre de la pensée contemporaine ? Ce numéro de Trafic, j'en fais le pari, en apportera certainement la navrante démonstration.»
L'idée de ce numéro exceptionnel a germé il y a plus d'un an. Jean-Claude Biette, cinéaste et rédacteur en chef, en avait eu l'idée. Il est mort à 60 ans d'une crise cardiaque en juin 2003. Est publié en début de volume un texte posthume datant de 1999, intitulé «Le cinéma et l'éthique». Créée en 1992 par Serge Daney, la revue subissait alors un second deuil d'importance. Le comité de rédaction (Sylvie Pierre, Raymond Bellour, Patrice Rollet) n'a pourtant pas baissé les bras, de tristesse ou de découragement. Ce numéro tendu, hétérogène, parsemé de signatures ultrachic (Stephen Dwoskin, Jim Jarmusch, Gus Van Sant, Abbas Kiarostami, Dennis Cooper, Stanley Cavell...) le prouve en 600 pages d'écrits sans photos.
Ricochets. Avec soixante-dix contributions de tous horiz