Sa troisième fantaisie, donc. Fantaisie: une manière d'échapper aux classifications, tout en semant des petits cailloux. Elle dit qu'elle n'a pas inventé le genre; pourtant, on peine à trouver d'autres «fantaisies» cinématographiques. Jeanne Labrune aime Billy Wilder et redoute les gags «un peu poisseux» qui marquent nombre de comédies d'aujourd'hui.
Fantaisie: c'est une façon de jouer avec la mise en relation d'objets (ou obsessions) qui, apparemment, n'ont rien à voir. Mais on peut compter sur la cinéaste pour nous montrer légèrement, sans faire la leçon, comment une mite et un muet peuvent se rejoindre sans se rencontrer; ou comment l'ère du soupçon a remplacé celle du doute. Elle dit: «Vous ne trouvez pas qu'aujourd'hui le soupçon s'accroche à n'importe quoi? Des rillettes au voisin de palier, de la relation amoureuse à la moindre lubie, tout est sujet à caution, tout est susceptible de nous apporter la mort. Lorsqu'un facteur de risque est enfin maîtrisé, le fameux principe de précaution s'exerce ailleurs. Vous pensez vraiment que l'on vit dans une société plus dangereuse qu'il y a trente ans? »
A l'affût. Jeanne Labrune a une manière stimulante et reposante de ne pas laisser les évidences à leur place. Reposante, car son goût de la conversation et de l'argumentation permet de lâcher prise. On se sent moins à l'affût, en compagnie de quelqu'un qui l'est. Si ses derniers films ont en commun de faire entendre comment la langue de bois fonctionne, Cause toujours laisse aussi