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Libération
Critique

Grand bain en eaux troubles

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Dans «la Niña Santa», sexe et religion se frôlent près d'une piscine.
publié le 15 septembre 2004 à 2h09

Rarement avait-on été si impressionné par un premier film. C'était La Cienaga, il y a trois ans, macabre, mélancolique, émouvant, brillant comme un diamant noir. Et rarement aura-t-on été de nouveau impressionné par cette manière qu'a Lucrecia Martel, dans son second film, d'approfondir son univers. On retrouve dans La Niña Santa les éléments de La Cienaga, cette province argentine au milieu de nulle part, ces obsessions qui poissent, ce jeu des regards et des pulsions organisé tel un échiquier déliquescent autour de la figure maternelle, cet éveil des sens chez les jeunes filles que rien n'effraie et que tout inquiète, et surtout cette présence centrale de l'eau croupissante d'une piscine, le miroir des âmes noires qui hantent ce deuxième film maîtrisé et tendu. Rien ne semble pouvoir apaiser les sous-entendus qui rôdent derrière les lunettes de maîtresse d'école que porte Lucrecia Martel.

Dans l'hôtel Thermas, lieu d'enfance de la cinéaste où elle situe La Niña Santa, décati mais empli d'une vie fluide, se tient un congrès de médecins. La propriétaire des lieux, Helena (Mercedes Moran), est une femme divorcée, attirante, hésitante, dont la fille, Amalia (Maria Alché), 15 ans, vit dans un monde tiraillé entre mystique et pulsion sexuelle. La vie de l'hôtel, le commerce des médecins en goguette, notamment le jeu troublant de Carlos Belloso, les méandres familiaux et l'univers des jeunes filles se croisent en un ballet aux mouvements subtils, marqueterie de sentiments et de si